Réforme explosive du RSA : point sur la situation.

Le gouvernement français fait face à des tensions sociales sur plusieurs fronts, et pas seulement sur la question de la réforme des retraites. Cette semaine, Élisabeth Borne, ministre du Travail et de l’Emploi, a annoncé qu’elle rencontrerait les cinq principales organisations syndicales pour renouer le dialogue. Les syndicats souhaitent notamment discuter de la réforme du Revenu de solidarité active (RSA), qui vise à encourager les bénéficiaires à suivre un parcours de formation de 15 à 20 heures par semaine pour améliorer leurs perspectives d’emploi.

La réforme a été lancée sous forme d’expérimentation dans 18 départements français le mois dernier, avec pour objectif de la généraliser à l’échelle nationale d’ici 2027. Cette mesure répond à une préoccupation exprimée par la Cour des comptes, selon laquelle environ la moitié des bénéficiaires du RSA ne cherchent pas activement du travail, et 17% d’entre eux ne bénéficient d’aucun suivi. Cependant, la conditionnalité d’accès au RSA est vivement critiquée par les syndicats, les associations caritatives et les personnalités de gauche.

Des opposants à la réforme soulignent que les bénéficiaires du RSA ne sont pas des personnes qui ont choisi de vivre des aides sociales, mais souvent des personnes peu qualifiées qui alternent entre emploi précaire et chômage, ou encore des personnes ayant connu un accident de la vie. En effet, selon François-Xavier Merrien, sociologue spécialisé dans l’étude des bénéficiaires du RSA, cette réforme insinue à tort que les bénéficiaires sont des personnes vivant exclusivement des aides sociales. Il ajoute que le discours d’Emmanuel Macron sur les personnes bénéficiant du RSA, qui opposait ces dernières aux travailleurs, ne fait que stigmatiser davantage cette population.

Le risque de dissuader les personnes de demander le RSA est également souligné par les associations caritatives. Celles-ci craignent qu’une stigmatisation accrue des bénéficiaires du RSA entraîne une augmentation du taux de non-recours à cette allocation, qui est actuellement de 34%. Cette situation pourrait parallèlement creuser le nombre de personnes en situation de précarité.

De plus, la faisabilité de la mise en œuvre de cette réforme est mise en doute. Les expérimentations en cours ne seront pas terminées avant décembre 2023, alors que le gouvernement souhaite présenter son projet de loi dès le mois de juin. Le recrutement de conseillers pour inscrire les bénéficiaires à France Travail et leur proposer un suivi personnalisé s’annonce également difficile, tout comme la recherche de 30 millions d’heures d’activité par semaine pour répondre à cette réforme.

Malgré ces points de tension, la réforme du RSA ne devrait pas entraîner de grandes manifestations, car elle ne concerne qu’une partie relativement restreinte de la population. Toutefois, la généralisation de la réforme du RSA en France devrait être suivie de près pour évaluer ses effets sur les bénéficiaires et sur la réduction de la précarité.